Quel est ton univers chorégraphique ?
Mon univers chorégraphique s’inscrit dans une démarche interdisciplinaire entre danse et théâtre. Étant interprète-créateur en danse contemporaine et comédien, je m’intéresse à la construction du personnage en danse à travers les notions d’incorporation, d’incarnation et d’interprétation. Ma recherche interroge les porosités entre jeu théâtral et écriture chorégraphique, en valorisant le corps sensible comme vecteur de narration.
Ancrée dans une pratique somatique, ma démarche explore la dimension expressive du corps à travers l’expérience sensorielle, l’écoute émotionnelle et l’engagement physique. Je développe une forme de narration corporelle, où le ressenti prime sur le récit verbal, et où le mouvement devient langage.
J’aime jouer avec l’imaginaire, l’humour, l’absurde et la théâtralité, afin de rendre ma danse accessible sans en diluer la portée poétique. Mes projets mettent en scène des personnages traversés par les émotions fondamentales (joie, peur, tristesse, colère, surprise, dégoût), dans une esthétique de tableau vivant où le lien entre le corps et son environnement est essentiel.
Mon approche vise à faire émerger une danse habitée, organique et communicative, au croisement du sensible, du vécu et du jeu.
Peux-tu nous dire quelques mots sur ta création / projet en cours ?
Mon projet en cours est la continuité de mon solo “danse Harpagon, danse”. Suite à un temps de résidence, j’ai exploré le champ des possibles avec cette notion de personnage en danse. Je m’intéresse à la manière dont des états corporels, notamment par le travail sur les sensations internes, les désalignements physiques et les chemins de mouvement inhabituels peuvent faire émerger des identités dansantes singulières.
Le port du masque, l’exploration d’archétypes (comme ceux issus de la Commedia dell’Arte ou du clown), ainsi que l’usage du costume, sont autant d’outils qui m’inspirent et viennent perturber les habitudes du corps pour ouvrir des possibilités expressives nouvelles. Chaque masque, chaque vêtement influence directement la posture, la dynamique gestuelle, le rapport à l’espace et même la qualité de présence.
À travers cette approche, je cherche à composer une galerie de personnages dansants, chacun porteur d’une logique corporelle et émotionnelle propre. Ce ne sont pas des personnages psychologiques au sens classique, mais des entités physiques, qui naissent d’un dialogue intime entre imaginaire, corps et mouvement.
Ce travail a été amorcé lors d’une résidence à l’École de danse contemporaine de Montréal, où j’ai aussi entamé une phase de transmission avec deux interprètes. Leurs propositions ont enrichi la recherche et ouvert de nouvelles pistes.
Quel atelier as-tu prévu avec les danseur·se·s de Danse en Seine ?
À la suite de cette résidence, j’ai entamé une première phase de transmission avec deux interprètes. Leurs propositions ont profondément enrichi la recherche, révélant des dynamiques inattendues et ouvrant de nouvelles pistes d’exploration.
Dans le cadre des ateliers avec les danseur·se·s de Danse en Seine, je souhaite poursuivre cette continuité, en approfondissant la recherche amorcée. Le projet en est encore à ses balbutiements. Je me trouve actuellement dans une phase d’exploration fondamentale, où je cherche à comprendre comment transformer mes outils chorégraphiques, issus du travail somatique, de l’imaginaire, du masque, de la théâtralité – en une forme dansée structurée.
L’objectif de ces ateliers est de faire traverser aux danseur·se·s différentes étapes de ma recherche chorégraphique afin d’observer comment les corps réagissent, comment les états de présence émergent, et comment cela peut nourrir ma recherche en cours. Cette mise en partage m’aidera à affiner les rouages du projet, à tester certaines intuitions, et à ouvrir le dialogue.
Pourquoi avoir rejoint la formation Incubateur de chorégraphes ?
J’ai rejoint l’incubateur de chorégraphes de la Fabrique de la Danse pour bénéficier d’un cadre structurant et stimulant à un moment charnière de mon parcours artistique. Mon travail est actuellement en pleine phase d’exploration, et j’éprouvais le besoin d’un accompagnement pour clarifier mes intentions, affiner mes outils et penser la mise en forme de mes recherches sur le long terme.
L’Incubateur représente pour moi un espace rare où l’expérimentation chorégraphique peut dialoguer avec des apports théoriques, dramaturgiques, stratégiques et pratiques. C’est aussi une opportunité précieuse de confronter ma démarche à celle d’autres artistes, d’échanger, de sortir de l’isolement parfois lié à la création, et de faire mûrir un langage artistique personnel dans un cadre bienveillant mais exigeant.
Je souhaite y construire les fondations solides d’un premier solo, tout en développant une pensée chorégraphique capable de s’inscrire dans un processus de création à plus long terme.