Depuis vendredi soir, la Cendrillon de Noureev est donnée à l’Opéra Bastille. Pour ses premières dates, le ballet est revisité par Agnès Letestu, étoile nommée en 1997 (à 26 ans), aujourd’hui au point culminant de sa carrière (40 ans).

Dimanche 27, 14h30, après avoir profité du grand escalier rouvert au public il y a quelques mois, c’est une salle comble et étrangement jeune qui s’apprête à admirer 3 heures durant (entrecoupées d’entractes, ne vous affolez pas !) le conte de Perrault remis au goût du jour par Noureev dans un univers Hollywoodien.

 Le rideau s’ouvre après une introduction typique de Prokofiev. Quatre femmes sur scène… Quatre femmes ? Quatre paires de pointes, certes, mais dont une plus proche d’un 45 que d’un 36 pour le danseur Stéphane Phavorin, excellente Marâtre aux formes généreuses et à la coquetterie extravagante… Agnès se tient dans son coin, à côté de la cheminée, tandis que les deux sœurs se crêpent le chignon. Ludmila Pagliero est assez crédible en peste et j’ai particulièrement apprécié sa prestation d’actrice et de danseuse.

 Revenons à notre grande (1,77m) et fine Agnès/Cendrillon, qui captive l’attention et l’admiration de la salle dès sa première variation. On retrouve ses émouvants mouvements de poignet (qui l’ont fait nommer étoile à la suite d’une représentation du Lac des Cygnes) et cette délicatesse magnifique dans chacun de ses ports de bras. Habillée en souillon, Agnès reste une élégante princesse.

Très vite le ballet s’emballe, et Cendrillon nous montre différents visages, celui de Fred Astaire étant plutôt réjouissant et constitue une parfaite transition vers le tableau suivant. Si je n’ai jamais bien compris la signification de ce défilé de mode autour des quatre saisons, le moment est dansant et coloré et donne part belle aux premières danseuses Myriam Ould-Braham, Alice Renavand, Eve Grinsztajn et Nolwenn Daniel… Puis, enfin, l’actrice prend forme et s’échappe dans son carrosse-Ferrari, tandis que la belle valse de Prokofiev clôture l’acte…

 

L’acte suivant met en scène une jeune actrice à ses débuts. Agnès devient majestueuse, fière et resplendissante : a star is (re) born. Malgré ses 40 ans, la danseuse demeure parfaite dans ce rôle de jeune première et nous sommes transportés dans cet univers hollywoodien… Le conte de fée moderne agit sur tous : qui ne se rêve pas sur le grand écran plutôt que derrière son 15 pouces 12 heures par jour dans un open-space aseptisé ?

 

 

Le dernier acte semble typique de Noureev : il est centré sur l’acteur vedette (Stéphane Bullion) et ses amis masculins, partis à la recherche du second escarpin et surtout de sa propriétaire. De beaux ensembles virils et dynamiques répondent aux défilés de mode féminins du 1er acte. On retrouve néanmoins de nombreux éléments habituels des grands ballets classiques : des danses espagnole, chinoise puis russe, mais surtout un splendide pas de deux final, une fois de plus merveilleusement interprété par deux grands artistes : Agnès Letestu et Stéphane Bullion.