©radionotredame.net
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Retour sur la conférence de Benjamin Millepied du samedi 20 septembre, à l’occasion du festival organisé par le journal Le Monde. Le futur directeur du ballet de l’Opéra de Paris évoque sa vision et ses objectifs pour la compagnie, son expérience de chorégraphe et de danseur, ses futurs projets.

Ses objectifs : faire évoluer le ballet classique… 

Un des objectifs du futur directeur est de faire avancer le ballet classique. Comment ? En utilisant la technique des danseurs exceptionnels de l’Opéra de Paris (formés sur les ballets d’antan comme la Belle au Bois Dormant) pour créer des ballets contemporain. L’Histoire du ballet de l’Opéra de Paris fait sa force. Benjamin Millepied veut donc se servir de cette Histoire pour faire progresser l’ancien ballet et en créer de nouveaux.

Tout comme la collaboration entre le compositeur Tchaïkovski et le chorégraphe Petipa, qui amena une nouvelle chorégraphie du ballet, Benjamin Millepied veut créer des collaborations entre la danse et la musique, mais aussi le théâtre. A long terme, il souhaite faire travailler la compagnie dans cette direction.

… et travailler sur l’éducation des danseurs

En tant que chef de troupe, le futur directeur se définit aussi comme responsable de l’éducation des danseurs : éduquer sur la danse, mais aussi sur la musique, et ce dès l’école.

Ce n’est pas avoir été danseur et leur apprendre à danser.

Il veut amener des nouveaux chorégraphes, et ouvrir une Académie Chorégraphique pour les danseurs qui en ont la fibre. Le parallèle est fait entre le métier de chorégraphe et celui de compositeur : tout comme un musicien ne s’improvise pas compositeur, un danseur ne s’improvise pas chorégraphe. C’est un métier à part entière, qui s’apprend : comment utiliser l’espace, le rapport à la musique, comprendre ce qu’ont fait les autres chorégraphes…

La chorégraphie est un art infini.

Fort de son expérience

Benjamin Millepied ne veut pas parler de « culture américaine » – ne pas oublier que Balanchine est russe. Lors de sa carrière de danseur au New-York City Ballet, ses principales influences sont Balanchine et Robbins. Au début des années 2000, il se lance dans la programmation de spectacles : une centaine de spectacles produits, auto-produits, succession de petits projets pour tester et voir des résultats rapidement. Il acquiert ainsi une expérience de management, tout en apprenant à soulever des fonds. Fort de son expérience, le futur directeur de la danse regorge de dynamisme et a envie de faire bouger les choses rapidement.

Les changements…

Le ballet de l’Opéra de Paris possède une hiérarchie, avec différents grades au sein du corps de ballet. Même si Benjamin Millepied reconnaît qu’il est difficile de bouger cette hiérarchie institutionnelle, il évoque son envie de supprimer un grade, il y en a trop.

Un changement lui tient particulièrement à coeur : donner du temps pour les créations. Il y a beaucoup d’attentes sur les chorégraphes qui viendront pour créer, et il souhaite organiser l’emploi du temps du ballet en fonction. En prenant en compte la physicalité du danseur.

… et ce qu’il souhaite préserver

Pour Benjamin Millepied, l’Ecole Française est un bijou à préserver à tout prix. Dans un monde où le ballet souffre, il faut préserver cette élégance, ne pas tomber dans le superficiel. Aujourd’hui, il existe beaucoup de compétitions de danse, qui font plus penser à de la gymnastique. Hors la danse est un art, le public veut voir des artistes qui ont quelque chose d’unique. Il faut bien sûr faire évoluer l’Ecole de danse, mais en préservant son charme, son travail du pied… sur la lignée de l’excellence portée entre autres par Claude Bessy.

Il souligne tout de même le danger des constants examens au sein de la compagnie pour changer de grade. Les danseurs doivent danser avant tout pour eux-même. Le Corps de Ballet est comme un jardin, avec des fleurs de toutes les couleurs. Il a besoin d’individualité, mais pas d’uniformité. La qualité artistique est sa priorité, tout comme cela l’était pour ses prédécesseurs.

Futurs projets ?

L’ancien danseur étoile a souffert du manque d’ouverture d’esprit dans la programmation quand il était à New-York. Brigitte Lefèvre est d’ailleurs selon lui la seule a avoir eu cette ouverture d’esprit aussi forte, en programmant des créations de Jérôme Bel par exemple.  Il veut faire avancer le ballet avec l’Histoire, dans une modernité qui lui sera propre.

Les créations, il peut y en avoir des réussies, des ratées. C’est comme ça.

La narration dans le ballet l’intéresse énormément. Non pas telle la pantomime, mais une approche  de la narration se rapprochant du cinéma. Benjamin Millepied livre son envie de collaborer avec un grand compositeur contemporain, et de travailler sur l’approche théâtrale du spectacle. Tout comme à l’époque, la musique de Tchaïkovski – faisant suite à celle de Minkus – a fait bouger les danseurs différemment, le futur directeur veut créer de nouvelles collaborations entre chorégraphes et compositeurs pour avancer, créer.

L’ouverture de la saison 2015-2016 se fera d’ailleurs sur un ballet en trois actes, auquel Benjamin Millepied participera en tant que chorégraphe.