Dix des danseuses de Danse en Seine ont répété intensément pendant le mois d’avril pour le premier court-métrage de Danse en Seine. Créé dans le cadre de Dansons les Amandiers, le tournage aura lieu fin 2015. Alexandra nous en dit quelques mots. 

Imaginons que les spectres d’êtres à la beauté plus que parfaite inondent notre quotidien, qu’ils soient présents monumentalement quand on prend le métro le matin pour se rendre au boulot par exemple, qu’ils se bousculent sur les pubs de notre écran d’ordinateur, ou encore qu’on les retrouve en couverture de tous les magazines … magazines qui se targueraient d’ailleurs de posséder la recette miracle pour nous permettre d’être leurs semblables. Bref, un déferlement et une pression tels que cette beauté surnaturelle deviendrait, penserions- nous, la norme à atteindre.

Loin d’être de la science-fiction, ce quotidien est en fait celui que nous partageons tou(te)s. C’est en partant de ce postulat que le réalisateur Jacques Simon a décidé de s’associer à Danse en Seine et à la chorégraphe Sandra Français pour créer un court-métrage qui se penche sur les effets des médias modernes sur les femmes et la vision qu’elles ont de leur propre estime.

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Répétition publique le 12 avril

Jacques, avec l’aide de la scénariste Elizabeth Breiner, a décidé de traiter le sujet de manière comique, satirique même, dénonçant ainsi de manière encore plus corrosive et dramatique la pression exercée sur la gente féminine. Et l’idée de raconter cette histoire par la danse était toute naturelle, le corps en mouvement permettant d’incarner au mieux, cette lutte incessante et acharnée pour accéder à la perfection.

L’audition organisée pour trouver les « comédiennes/danseuses » nous avait déjà donné le ton. Outre nos qualités techniques de danseurs, il nous a été demandé un réel travail d’interprétation. Dans le désordre, nous avons été tour à tour des poupées Barbie, des pantins desarticulés, des mannequins épuisés par le poids métaphorique de la perfection inatteignable, des êtres qui passent de la torpeur au rire, des larmes à la rage, de la colère à la folie, en une fraction de seconde. Un travail à la fois étrange et fascinant.
Puis sont venus les deux sessions de travail en groupe. Orchestrées par le duo Sandra et Jacques, ces sessions ont été intenses en recherches et en improvisations.

Pendant que Jacques envisageait déjà sa mise en scène et ses cadres de caméra, Sandra partait du Butō pour nourrir notre imaginaire : c’est une forme de danse/théâtre avant-gardiste japonaise permettant au corps de parler pour lui-même à partir de mouvements primaires, voire grotesques, sans se soucier d’aucun esthétisme.

Cela nous a aidé à trouver la matière chorégraphique afin d’incarner toutes les phases de transformation en Beauté Parfaite : les différents types de régimes, même les plus incongrus – dormir pour ne plus manger, avaler un ver solitaire qui pompe les calories … pour n’en citer que quelques-uns –, l’épilation douloureuse, le maquillage éclatant, l’hydratation corporelle à base de crèmes et de concombres… sans oublier l’apprentissage pour devenir des êtres à la fois désirables et formatés.

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Sandra s’est chaque fois basée sur nos trouvailles pour créer des phrases chorégraphiées. Ce qui rendait le travail d’autant plus passionnant. L’énergie de Sandra, son sourire et sa bienvaillance constante, alliés à la détermination et aux géniales idées de Jacques sont un réél catalyseur de créativité. Nous formons une équipe soudée , avançant dans la même direction, avec la même envie et le même bonheur. Les échanges fusent et sont riches !

Travaillant moi-même dans le cinéma (je suis assistante réalisateur et ai réalisé deux courts-métrages), c’est forcément un immense plaisir d’avoir l’occasion de lier mes deux passions, et d’assister à toutes les étapes d’un tel projet, de sa genèse au résultat final. C’est également très amusant d’envisager, dès en amont, la chorégraphie sous l’œil de la caméra. Il faut tout de suite penser aux faisabilités des mouvements dans le cadre, aux effets spéciaux éventuels. C’est à la fois contraignant et grande source d’inspiration.

C’est donc un travail différent de la création d’une pièce chorégraphique qui aurait pour ambition d’être jouée sur scène, dans une cohérence générale. Ici, il est question de phases successives, qui doivent impérativement être efficaces dans un laps de temps très court. Nous avons évidemment hâte de la suite et de tout vous dévoiler !